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Emmanuel Macron et les mots révolutionnaires


Insider/outsider

Lors de ses différentes prises de parole, Emmanuel Macron évoque souvent le couple insider/outsider. Loin de moi l’idée de juger d’un modèle économique opposant d'une part les insiders, c’est-à-dire les salariés avec un contrat stable et de l'autre les outsiders, travailleurs précaires ou chômeurs, souvent jeunes et peu qualifiés, nouveaux venus sur le marché du travail, qui seraient prêts à travailler pour un salaire moins élevé que celui des insiders. Ce couple notionnel a été en particulier mis en évidence par deux économistes anglophones, Assar Lindbeck et Dennis J. Snower dans The Insider-Outsider Theory of Employment and Unemployment (1989, Cambridge, Mass. MIT Press).

Sans doute, Emmanuel Macron fait-il implicitement référence à leurs travaux lorsqu’il s’empare de ces notions. Cependant, il faut noter qu’à la différence de Lindbeck et Snower, Emmanuel Macron parle français et qu’il s’adresse à des destinataires français pour lesquels ces deux mots ne résonnent pas similairement. Si le mot « insider » est clairement perçu comme un anglicisme, le mot « outsider » est quant à lui compris comme une métaphore.

Rappelons que l’outsider est d’abord un cheval ne figurant pas parmi les favoris mais dont on reconnaît qu'il peut déjouer les pronostics et qu’il désigne ensuite, par analogie, un concurrent qui ne figure pas parmi les favoris, mais qui, cependant, pourrait gagner.

La terminologie sportive élimine toute idée de marginalité : on ne voit pas en l’outsider un travailleur précaire, un laissé pour compte de la société. La métaphore semble même mettre l’accent sur l’inversion d’une logique établie, présupposée : l’outsider peut tout oser et on a raison de miser sur lui. Car parfois les premiers sont les derniers et inversement. Ainsi, un mot apparemment anodin, emprunté au vocabulaire de l’économie, peut-il véhiculer un potentiel proprement révolutionnaire, — qu’on songe évidemment au titre du livre programme du candidat Macron, Révolution — . Parler d’outsider suggère qu’il n’y a pas d’ordre définitivement établi, mieux cela laisse entendre qu’on peut inverser l’ordre social, le mettre sens dessus dessous.

"(…) Rééquilibrer le couple risque-rente, c’est donner plus de place aux outsiders par rapport aux insiders. Celui à qui le risque peut profiter, c’est celui justement qui, au départ, n’a rien, ne possède rien, si ce n’est son énergie et son envie, sa volonté d’entrer dans un nouveau marché en innovant ou en construisant quelque chose. A l’inverse, dans les secteurs où la rente est forte, l’insider est protégé et il n’est jamais incité à innover. Surtout, ces secteurs sont bloqués et ils demeurent injustement fermés : il est très difficile pour les outsiders d’y entrer."

Emmanuel Macron cité par L’Obs, du 20 avril 2016, reprenant une interview donnée à la revue Risques, référence du secteur de l'assurance.


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