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Eloge de l'impureté

Il est temps de faire l’apologie de l’impureté, ou plus exactement de toutes les impuretés.

Rien n’est plus dangereux qu’une société qui croit pouvoir éliminer les déviances — j’emploie évidemment ce terme à dessein — déviances qu’elle définit à un temps t et qui ont vocation à être redéfinies autrement plus tard. Certains et certaines seraient bien avisés (avisées) de lire ou de relire La Tâche de Philip Roth et de ne pas seulement y voir l’inquiétude d’un écrivain contre les outrances du politiquement correct.

Oui, il est temps de faire l’éloge de l’impureté, du droit à l’écart. Et de marteler le leitmotiv :

Dans un monde orthodoxement chrétien, il faut se battre pour la laïcité,

dans un monde orthodoxement laïc, il faut rappeler le droit au christianisme.

Dans un monde orthodoxement machiste, il faut se battre pour le droit des femmes,

dans un monde orthodoxement féministe, il faut rappeler le droit au sexisme.

Dans un monde orthodoxement industriel, il faut se battre pour l’écologie,

dans un monde orthodoxement écologique, il faut rappeler le droit à l’ordure.

Dans un monde orthodoxement cycliste, il faut rappeler le droit à la vitesse.

Dans un monde orthodoxement bobo bon chic bon genre, il faut rappeler le droit aux grosses bagouses vulgaires.

Et cetera.

On ne crée pas une société sur la culpabilisation des impurs, en hurlant avec les loups ; on ne construit pas son groupe d’amis en vouant les déviants à la vindicte publique, en sonnant l’hallali et la chasse aux sorcières.

Et les sorcières aujourd’hui ne sont pas communistes. Elles prennent ici la figure du capitaliste, là celle du pollueur, ici la figure du harceleur, là celle du catholique. Les sorcières ont la métamorphose facile. Ou plutôt, les chasseurs de sorcières ont le gibier pluriel.

Comment a-t-on pu se réjouir de la condamnation publique et tous azimuts des « harceleurs » — sans la moindre prudence, sans le moindre rappel du droit à la présomption d’innocence — ? Comment peut-on être aveuglé par son bon droit au point d’oublier au nom de la « fin » que certains moyens relèvent des pires heures de l’Histoire ?

Notre époque est présomptueuse, elle croit pouvoir éradiquer le mal. C’est mal connaître l’homme, ses passions et ses vices. Et c’est être soi-même bien méchant que de vouloir éliminer les méchants. N’oublions pas nos classiques, ce sont de bons garde-fous. Ainsi Molière nous a-t-il appris qu’« à force de sagesse on peut être blâmable » et qu’il faut être « sage avec sobriété». Corriger, réguler, canaliser, c’est le rôle qui nous est à chacun assigné.

Lapider, non.


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